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ACTUALITÉS NATIONALES

16 juin 2022

Surchauffe à l’école

Ce que disent les textes


Il n’existe pas de seuil de température minimum ou maximum au-delà duquel on ne peut faire classe. Dans le code du travail, les seules indications données sont les suivantes :


Article R. 232-6 «Les locaux fermés affectés au travail doivent être chauffés pendant la saison froide. Le chauffage doit être assuré de telle façon qu’il maintienne une température convenable et ne donne lieu à aucune émanation délétère».

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Art. R. 235-2-9 «Les équipements et caractéristiques des locaux de travail doivent permettre d'adapter la température à l'organisme humain pendant le temps de travail, compte-tenu des méthodes de travail et des contraintes physiques supportées par les travailleurs (…).»

Il découle de ces textes qu’il est de la responsabilité de l’employeur de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour protéger la santé des personnels exposés à des ambiances thermiques excessivement élevées ou basses. Cette responsabilité est partagée par la commune en ce qui concerne les locaux scolaires et leur équipement.

 

Une température convenable, adaptée à l’organisme humain

L’INRS (Institut National de Recherche et de Sécurité), organisme scientifique et technique qui produit des études dans le domaine de la prévention des risques professionnels, indique dès 2011 dans Conception des lieux et des situations de travail :

«L’inconfort en été (…) se traduit à partir de 26°C par une baisse de productivité, engendre une fatigue excessive au-delà de 30°C et peut ensuite nécessiter l’évacuation du personnel à partir de 33°C en cas de défaut prolongé de renouvellement de l’air»

 

L’INRS rappelle néanmoins que la mesure de l’ambiance thermique est complexe et ne peut se limiter à la seule donnée de température. 4 grandeurs interviennent :

  • La température de l’air. C’est la grandeur la plus accessible.

  • L’humidité de l’air, qui limite l’évaporation de la sueur et son effet refroidissant.

  • La circulation de l’air qui favorise l’évaporation de la sueur.

  • La température de rayonnement, difficile à mesurer. Il s’agit de la chaleur rayonnée par les murs s’ils sont chauds, notamment s’ils sont mal isolés.

 

L’inconfort thermique est donc une notion subjective. Une température de 32 °C dans un lieu ventilé par un air sec est bien plus supportable qu’une température de 28°C dans un lieu mal ventilé et dans une ambiance humide.

 

Le SNE encourage les équipes à ne pas sous-estimer la souffrance engendrée par la chaleur au travail, tant pour les élèves que pour les personnels. Il est non seulement légitime de désirer travailler dans les meilleures conditions possibles mais aussi indispensable de préserver la sécurité de tous.

 

Les effets de la chaleur sur la santé

  • Les effets physiques

Une température excessive peut entraîner divers symptômes, plus ou moins graves, qui peuvent aller du gonflement des membres inférieurs au coup de chaleur (élévation de la température du corps au-delà de 40°C), une urgence vitale. Ces symptômes sont aggravés par certains facteurs (âge, maladies cardiovasculaires, respiratoires, rénales ou endocriniennes, obésité et prise de certains médicaments). Leur survenue est très variable selon les individus.

Dans un avis rendu public le 1er juin 2020, le HCSP (Haut Conseil à la Santé Publique) indique : «Les enfants sont vulnérables à la chaleur, surtout si elle est extrême. La vulnérabilité est plus grande chez les jeunes enfants (0-4 ans) et chez ceux atteints de pathologies chroniques. Cependant la mortalité liée aux épisodes caniculaires ne semble pas plus élevée chez l’enfant.»

La sensibilité face à la chaleur étant très variable d’un individu à l’autre, il est important de ne pas sous-estimer les symptômes et de consulter son médecin si nécessaire.

  • Les effets psychiques

L’INRS, dans un article de juin 2019, indique que «les données publiées sur l’altération des performances cognitives lors de l’exposition à la chaleur sont hétérogènes, mais en faveur d’effets sur les processus cognitifs, mnésiques et attentionnels qui surviendraient plus précocement que les pathologies évoquées précédemment (ndlr : les effets physiques). Ces altérations (…) engendrent un ralentissement de la productivité par baisse de la concentration et une incapacité à accomplir des tâches mentales, et peuvent conduire à une irritabilité et des modifications de l’humeur.»

Pour le SNE, cet élément est primordial. On peut présenter la meilleure séance du monde, issue des pédagogies les plus pointues et des programmes les plus fraîchement élaborés, tout cela ne sert à rien si les élèves sont dans un état de léthargie cognitive.

 

Ambiance chaude et grossesse

Pendant la grossesse, la température fœtale est supérieure de 0.5 à 1°C à celle de la mère. Il est indispensable que la température de la mère ne monte pas pour que la chaleur du fœtus puisse s’évacuer. L’INRS indique l’existence de plusieurs études associant différentes pathologies de l’enfant à des vagues de chaleur pendant la grossesse ou à des épisodes de fièvre chez la mère, notamment pendant le premier trimestre.

Si vous êtes enceinte et travaillez dans une ambiance chaude, ne sous-estimez pas la gravité de la situation. Consultez votre médecin.

Quelles adaptations pour les écoles de France ?

 

Dans le cadre du plan de relance, 4 milliards d’euros seront consacrés à la rénovation du bâti scolaire avec, entre autres objectifs, la limitation de l’impact des fortes chaleurs. La cellule «bâti scolaire» du ministère a publié, en juin 2020, un guide à l’intention des collectivités intitulé «Améliorer le confort thermique des bâtiments scolaires pendant les vagues de chaleur».

Ce guide rappelle le contexte et les enjeux : «Le dérèglement climatique s’accélère et ses impacts seront importants en France dans les prochaines années. Les vagues de chaleur, notamment, devraient être plus fréquentes et plus intenses. Elles devraient également être plus précoces dans la saison et impacter ainsi beaucoup plus le fonctionnement des écoles et des établissements scolaires dont le bâti n’est pas toujours conçu pour faire face à de telles situations. (…) Les vagues de chaleur peuvent également impacter le fonctionnement de l’ensemble de la société, les enfants ne pouvant plus être accueillis dans les écoles et établissements scolaires. La problématique du confort d’été dans les écoles et les établissements scolaires devient donc un enjeu plus prégnant.»

Dans plusieurs régions de France, l’impact de la chaleur dans les classes est déjà problématique pour la santé des enfants et des personnels, ainsi que pour la qualité des apprentissages. L’aggravation à venir des conditions climatiques rend donc indispensable l’amélioration du bâti scolaire.

Ce guide présente de manière précise tout un éventail de solutions, qu’elles soient actives (climatisation) ou passives (protections solaires des vitres, l’ombrage par la végétation, l’isolation des parois, le traitement et la couleur des façades, la ventilation des locaux, le brassage d’air, traitement des revêtements extérieurs…).

C’est un outil précieux si la commune veut entreprendre des travaux. Dans ce cas, nous vous conseillons de vous y référer lors de vos échanges avec la mairie afin de vous assurer qu’elle ne se fourvoie pas, par souci d’économie ou simplement par méconnaissance des phénomènes thermiques. Les solutions proposées sont diverses et techniquement détaillées, c’est une mine d’informations.

Il indique, par exemple, que les rideaux dits occultants «ne constituent en rien une protection solaire quand ils ne génèrent pas un plus grand inconfort (augmentation de l’effet de serre et surchauffe des systèmes de protection solaire).»

 

Ce guide rappelle également les enjeux environnementaux et précise que l’’amélioration du confort thermique du bâti scolaire doit passer par une réduction de la consommation d’énergie. Pour cela, les communes reçoivent une recommandation claire :

«Ce cadre invite les collectivités territoriales et les opérateurs privés à privilégier les dispositions passives pour améliorer le traitement du confort d’été

Il est toutefois conseillé de disposer d’une pièce équipée d’un système de climatisation : « Il serait pertinent de retenir les espaces fermés dont la surface est importante, comme les réfectoires ou encore les halls d’accueil, afin de pouvoir accueillir un grand nombre d’élèves et/ou de prévoir un roulement des classes dans cette pièce afin de permettre aux organismes de baisser en température à un moment de la journée et de limiter les impacts d’une exposition à de fortes chaleurs sur la durée.»

Cette préconisation a le mérite d’être lucide sur les enjeux de notre époque. Elle vise à limiter l’impact de l’activité humaine sur son environnement tout en s’assurant de disposer d’avoir les moyens de préserver la santé de toutes les personnes travaillant dans les écoles. Le SNE partage cette préoccupation.

Le guide rappelle cependant que la climatisation des locaux est le critère prédominant pour évaluer le confort thermique d’un bâtiment : «Tous ces facteurs n’ont pas le même poids dans l’analyse ; à titre d’exemple, un bâtiment dont les locaux bénéficient d’un dispositif de rafraîchissement (climatisation…) pourra proposer un excellent confort d’été indépendamment des autres facteurs.»

 

Ce que propose le SNE

 

Si des solutions existent pour améliorer le confort thermique des écoles, rien ne contraint les communes à les mettre en œuvre. Dans certains pays, comme en Suisse ou au Canada, les écoles ferment en cas d’alerte canicule ou d’un seuil de température relevée.

Notre syndicat opte pour une solution plus pragmatique. Nous demandons qu’un diagnostic de confort thermique d’été soit réalisé dans toutes les écoles. Un score minimum serait imposé, selon les régions, obligeant les communes à engager des travaux dans un délai raisonnable.

Cela permettrait de surcroît, en cas de fortes chaleurs ou de canicule, de prendre des mesures ciblées, allant jusqu’à la fermeture de l’école, selon la situation géographique et en fonction du score de confort thermique de l’école.

Ces contraintes seraient de nature à encourager fortement les communes à améliorer le confort thermique de leur école. Sans cela, les conditions de travail des enfants et des enseignants de certaines régions resteront problématiques et très dépendantes de la volonté politique des communes.

 

Que puis-je faire ?

A court terme

Les consignes ministérielles relèvent du bon sens. Vous pouvez les consulter sur :

https://www.education.gouv.fr/recommandations-aux-directeurs-d-ecole-et-chefs-d-etablissement-pour-prevenir-les-effets-de-la-10454

 

Pour le SNE, dans une situation de chaleur extrême, il faut garder à l’esprit que la santé passe avant toute considération pédagogique. S’il faut passer l’après-midi sous les arbres à pratiquer une activité calme et peu exigeante intellectuellement, voire à jouer à des jeux de société, ou encore s’arroser, il ne faut pas hésiter. Tant pis pour le programme. De toute façon, la chaleur excessive impacte fortement les capacités cognitives des élèves.

Le signalement d’une situation problématique par une fiche RSST peut permettre de trouver des solutions à court terme (fourniture de ventilateurs par la mairie, ou de climatisations portatives…).

 

A plus long terme, l’avis et les conseils du SNE

 

En attendant, le seul moyen d’obtenir des travaux d’amélioration du confort thermique sera donc la persuasion.

Nous vous conseillons d’appliquer la méthode suivante, déjà éprouvée dans plusieurs écoles :

  • Relever (cycle1) ou faire relever par les élèves (cycle 2 ou 3) la température maximale dans la classe aux mois les plus chauds de l’année.

  • Avec les plus grands, cela peut conduire à produire un graphique sur papier millimétré.

  • Présenter ce graphique chaque année au dernier conseil d’école, avec photocopies aux parents et à la mairie. Cette présentation a sa place en conseil d’école puisqu’elle s’inscrit dans un projet pédagogique alliant les mathématiques, les sciences mais aussi l’éducation civique. En effet, les élèves des plus grandes classes sont informés que le but de ces relevés est de sensibiliser la mairie à la nécessité de faire des travaux. Pour les classes de maternelle, l’enseignant mène cette action sans ses élèves, mais la présentation des températures est tout à fait pertinente dans un conseil d’école puisqu’elle apporte une information factuelle aux parents et à la mairie sur les conditions de travail des personnels et des élèves.

  • Il n’est pas nécessaire de demander quoi que ce soit, les parents d’élèves devraient prendre le relais de manière tout à fait légitime.

  • Ce graphique permet d’objectiver la température tout au long de l’année et le nombre de jours où la température de classe n’est pas acceptable (à vous de placer le curseur…). L’argument des mairies limitant la nécessité d’engager des travaux est souvent de dire qu’il ne fait chaud que quelques jours par an. Dans certaines écoles, la température maximale dans la classe est supérieure à 28°C plus du tiers de l’année.

Dans tous les cas :

  • Toujours considérer la mairie comme un allié. Cette dernière n’a pas d’obligation en termes de confort thermique, il faudra donc faire preuve de tact et de diplomatie courtoise. Passer par le biais des élèves est un moyen de jouer sur la corde affective. Le relais des parents d’élèves permet à l’équipe enseignante de ne pas se placer en opposition avec la municipalité. Se fâcher serait contre-productif.

  • L’amélioration du confort thermique peut représenter un gros investissement. Il faudra donc être patient et attendre peut-être plusieurs années.

 

La multiplication et l’intensification des épisodes de chaleur posent donc des problèmes dans les écoles en termes de conditions de travail, de santé et d’efficacité pédagogique. Il faut alors s’en remettre aux municipalités et dépendre une fois de plus des inégalités territoriales, de l’état des finances des communes ainsi que de la priorité qu’elles accordent à leurs écoles et aux enfants d’une partie de leur électorat. Nul doute que si les élèves avaient le droit de vote, toutes les écoles de France seraient déjà climatisées…

Le SNE sur BFM
Pétition en ligne

Le SNE lance une pétition en ligne pour demander qu'un diagnostic de confort thermique d'été soit effectué dans toutes les écoles de France.

 

Un score insuffisant serait contraignant pour que la mairie engage des travaux d'amélioration du confort thermique d'été. En cas d'épisode caniculaire, des fermetures ciblées pourraient être décidées localement en fonction du score obtenu par chaque école.

NOS IDÉES POUR L'ÉCOLE

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