ACTUALITÉS NATIONALES
27 janvier 2025
De l’inclusion à l’exclusion !
Exceptionnels il y a quelques années, les cas de classes et d’écoles qui craquent face aux comportements inadaptés de certains élèves, qu’ils soient ou non reconnus comme porteurs de handicap, se multiplient inexorablement.
Inutile de les recenser, tous les personnels de l’Education nationale y sont confrontés soit personnellement soit par la connaissance de collègues qui vivent une telle situation.
L’administration a tendance à oublier que dans ces classes, dans ces écoles, il y a d’autres élèves, des AESH, des enseignants et des ATSEM en souffrance.
Il en résulte un mal-être des élèves inclus, une baisse de niveau des autres élèves, une détresse accrue du personnel qui culpabilise de ne pas réussir à remplir correctement sa mission envers les uns et les autres élèves. Certains collègues remettent même en question leur engagement.
L’inclusion est alors vécue de façon douloureuse par tout le monde. D’une belle promesse d’inclusion, nous en arrivons à l’horreur de l’exclusion :
- L’élève en question fait peur aux autres, il n’a pas d’amis.
- Les autres élèves sont exclus d’un enseignement de qualité.
- De plus en plus de personnels jettent l’éponge et envisagent d’autres voies.
Face à cela, la réponse de la hiérarchie est malheureusement trop souvent, au mieux inadaptée, au pire incriminante envers le personnel, ce qui n’est pas admissible. Les AESH, personnels à la position des plus précaires, sont en toute première ligne de cette inclusion qui lamine les personnels et certainement aussi des élèves.
En cas de crise, quand les enseignants font appel à leur supérieur, ils savent très bien que l’IEN n’aura pas la réponse à tout et qu’il n’a pas de baguette magique. Les enseignants sont conscients que l’IEN est lui aussi entravé, qu’il n’a pas forcément les mains libres, qu’il n’a presque aucun outil à sa disposition. Le minimum attendu serait un soutien sans faille, l’apport de conseils et un appui logistique.
Témoignage d’une AESH
"Message à tous ceux qui œuvrent pour l'éducation,
Il y a quelques années encore, les choses étaient différentes dans les écoles. En tant qu’AESH,
notre rôle était principalement d’accompagner les élèves en situation de handicap pour favoriser leur autonomie. Nous intervenions individuellement, en groupe, ou mutualisés, avec des objectifs clairs et des besoins bien identifiés. Les situations complexes existaient, mais elles étaient moins nombreuses, et l’école était généralement un lieu capable de répondre aux attentes.
Aujourd’hui, les difficultés explosent. Les troubles du spectre autistique se multiplient, les troubles de l’attention et du comportement sont omniprésents, et les situations familiales fragiles aggravent encore les choses. Malgré tous les efforts des enseignants, des AESH et de toute l’équipe éducative, nous sommes à bout. La charge de travail s’intensifie, les besoins des enfants sont de plus en plus lourds, et, souvent, les moyens manquent pour y faire face. Faute de solutions adaptées ou de places dans des structures spécialisées, l’inclusion est poussée à son maximum, mais cela dépasse parfois les limites de ce que l’école peut offrir.
Et après ? Que va-t-on faire ? Où allons-nous, si cette situation continue de se dégrader ? Si rien ne change, le risque est immense : des enfants qui ne progressent pas comme ils le devraient, des enseignants et des AESH épuisés et découragés, et une école qui peine à tenir sa promesse d’être un lieu pour tous.
Nous avons besoin d’un vrai débat, de solutions concrètes et de moyens supplémentaires pour que l’inclusion soit réelle et adaptée. Parce que ces enfants méritent mieux, parce que l’éducation est un pilier de notre société, et parce que continuer dans cette direction sans réagir met tout le système en danger.
Merci d’avoir pris le temps de lire. Nous avons besoin d’être entendus pour avancer ensemble.
Paméla, AESH à Béziers depuis 8 ans, témoin d’une réalité qui ne peut plus être ignorée."
Malheureusement, encore trop souvent, des IEN ouvrent le parapluie. Ils demandent de remplir des dossiers, de leur envoyer des justificatifs sur ce qui a été fait, … parlent « alliance éducative », insinuent que tout n’a pas été entrepris au niveau de l’école, que les gestes pédagogiques n’ont pas été les bons… C’est alors la double peine pour les collègues. L’institution les place sciemment dans une position qu’elle sait intenable et leur reproche leur échec. Pourquoi ces IEN agissent ainsi ? Par faiblesse ? Par carriérisme ? Par idéologie ? Un peu des trois certainement.
Il existe heureusement des IEN qui ont les pieds sur terre et les mains dans le cambouis. L’équipe pédagogique peut compter sur eux, sur leur soutien, leurs conseils, leur appui face à ces situations. Leurs conseils sont alors entendus et bien vécus par l’équipe.
Le témoignage exposé plus haut est édifiant. Paméla va changer de métier… Une perte pour notre institution.
Il est grand temps de changer de cap, de sortir d’une inclusion à tout va qui n’a d’inclusion que le nom. Pour cela, nous avons besoin d’une volonté politique et d’un peu plus d’argent (nos enfants le valent bien, qu’ils soient porteurs de handicap ou non).
Il est temps de sortir d’une certaine idéologie qui tend à mépriser et à disqualifier ceux qui critiquent l’inclusion comme elle est faite aujourd’hui.
Il faudra admettre une fois pour toute que l’inclusion à tout prix ne fonctionne pas. Il faudra admettre que certains élèves (peu mais de plus en plus) n’ont pas ou plus leur place à l’école (au moins pour un certain temps), que ces enfants ont besoin de soins dans un milieu adapté et ont besoin d’être pris en charge par des professionnels en dehors de l’école.
OUI à l’inclusion mais pas à l’inclusion à tout prix !
Pour cela, le SNE revendique :
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La réécriture de la loi de 2005 en admettant que certains enfants n’ont pas leur place à l’école de façon temporaire, continue voire définitive.
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Le maintien et la construction de nouveaux établissements spécialisés (IME, ITEP, IEM, …) afin d’accompagner au mieux certains enfants lourdement handicapés.
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L’augmentation des places en hôpital de jour.
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La modification de l’acte 2 de l’école inclusive. Tous les enfants ont la capacité d’apprendre et de progresser, mais tous n’ont pas celle de devenir élève. De plus, l’école ne doit devenir ni un centre médico-social ni un centre médico-éducatif.
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Une formation et un salaire dignes de ce nom pour les AESH.
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Un système de remplacement pour les AESH.
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Des modules de formation continue pour les enseignants afin qu’ils puissent déceler, comprendre et appréhender différents troubles de l’apprentissage qui ne relèvent pas du domaine du soin médical.
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La possibilité pour l’école de ne pas accueillir un élève sans l’ensemble des moyens reconnus nécessairesà la gestion de son handicap.
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Le retour au fonctionnement qu’avaient les CLIS (avec un enseignant responsable des élèves inclus) à la place des ULIS (où les enfants sont inclus dans une classe de référence, avec un enseignant référent et où l’enseignant d’ULIS n’est que coordonnateur).
Pour arriver à une inclusion réussie il faut se donner les moyens budgétaires mais également changer de paradigme.
Le SNE est fermement opposé à ce que les écoles deviennent des lieux de soin. Elles sont et doivent rester des lieux d’instruction