ACTUALITÉS NATIONALES
31 octobre 2018
#PasDeVague, le droit d’inventaire du SNE
Depuis le braquage filmé d’une collègue, la parole se libère sur les violences abondantes et autres humiliations subies par les professeurs. Aucun ébahissement de la part du SNE qui a toujours défendu la place d’une saine autorité : «Maître à l’école» est d'ailleurs notre première devise.
L’école des fondamentaux, notre profession de foi, développe des solutions concrètes - proposition 4, page 21. Trop nombreux ont été et sont les discours de la bien-pensance de l’éducation stigmatisant l’autorité, la discipline et leurs défenseurs.
Non, les professeurs ne sont pas de monstrueux sadiques malveillants, dépourvus de toute empathie, sévères et injustes à l'excès, se complaisant par cruauté à rabaisser leurs élèves, à les humilier, à les accabler de mauvaises notes non méritées et à les battre par plaisir ! Il s’impose donc en ces quelques lignes de rétablir un peu d’ordre dans tout ce désordre …
L’autorité semble bien trop souvent abusivement assimilée à la notion d’autoritarisme…
Rappelons simplement ce qu’écrit Hannah Arendt dans La crise de la culture, « Puisque l'autorité requiert toujours l'obéissance, on la prend souvent pour une forme de pouvoir ou de violence. Pourtant l'autorité exclut l'usage de moyens extérieurs de coercition ; là où la force est employée, l'autorité proprement dite a échoué.
L'autorité, d'autre part, est incompatible avec la persuasion qui présuppose l'égalité et opère par un processus d'argumentation. Là où on a recours à des arguments, l'autorité est laissée de côté. Face à l'ordre égalitaire de la persuasion, se tient l'ordre autoritaire, qui est toujours hiérarchique.
S'il faut vraiment définir l'autorité, alors ce doit être en l'opposant à la fois à la contrainte par force et à la persuasion par arguments. (La relation autoritaire entre celui qui commande et celui qui obéit ne repose ni sur une raison commune, ni sur le pouvoir de celui qui commande ; ce qu'ils ont en commun, c'est la hiérarchie elle-même, dont chacun reconnaît la justesse et la légitimité, et où tous deux ont d’avance leur place fixée.) »
Encore faut-il reconnaître l’existence de la hiérarchie, de la dissymétrie qui se situe entre le maître et l’élève - entre celui qui sait et celui qui ne sait pas encore - puisque l’un des principes de l'éducation n'est pas de s'adapter à la médiocrité de l'enfant mais bel et bien de lui demander l'effort considérable de s'élever.
La fonction de professeur est ainsi par essence bienveillante
Le professeur a pour but d’élever l’enfant - c’est d’ailleurs pour cela que l’enfant porte le nom d’élève -, il s’agit de l’amener à son plein développement, de l’instruire, de l’éduquer et d’assurer son développement moral et intellectuel.
L’idée selon laquelle les enfants sont autonomes et qu’à la manière de petits adultes ils se gouvernent eux-mêmes est une hérésie. Refuser d'exercer son autorité, c’est d'une certaine manière abandonner les enfants à leurs sorts et n’oublions pas que l'enfant qui est livré à lui-même reste un « enfant sauvage » ! Alain - Émile-Auguste Chartier - nous dit même dans ces Propos sur l’éducation que l’éducation doit être répressive de manière à contraindre notre nature animale.
Il semblerait malheureusement que nos sociétés aient un problème avec tout ce qui a trait au passé…
N’y a-t-il pas une sorte de mépris pour les anciennes méthodes des instituteurs tels que Monsieur Louis Germain - l’instituteur d’Albert Camus ? Les hussards noirs de la République - comme les nomme Charles Péguy - sont aujourd’hui tellement méprisés par une certaine idéologie alors qu’ils étaient autrefois tant aimés ! N’en déplaise à certains le père de Marcel Pagnol, Monsieur Joseph Pagnol, était assurément un bienfaiteur ! Monsieur Louis Germain était un bienfaiteur ! Relisez la lettre qu’Albert Camus lui adresse en lui dédiant son Prix Nobel de littérature !
Il est de notre ressort de faire le lien entre l’ancien et le nouveau … Qui se veut être contre le progrès ? Personne de sensé ! Mais toutes les évolutions ne sont pas bonnes et il est parfois plus salutaire de conserver un bon système plutôt que d’opter aveuglement pour une évolution qui se verra - ou qui se voit - devenir une terrible régression !
L’autorité et la discipline ne sont donc pas des questions manichéennes. Il est ainsi indispensable de bien garder à l’esprit que le professeur qui fait preuve d’autorité n’est pas moins bienveillant que celui qui vomit ce substantif … Notre dessein est de remplacer les inégalités de naissances et de fortunes par celles du talent et de la vertu !
C'est donc bien pour éviter la cooptation bourgeoise et aristocratique que nous voulons transmettre les savoirs élémentaires à tous et ainsi respecter l'égalité des chances, la méritocratie et la cohérence de notre institution bicentenaire, l'École de la République Française - et cela ne peut avoir lieu sans autorité, sans discipline, sans en somme des conditions propices à l’élévation de nos élèves.